Éditions GOPE
2e édition illustrée, 224 pages, 13x19 cm, 18.85 €, ISBN 978-2-9535538-6-4





mercredi 11 août 2010

Pourquoi GOPE ?



On m'a souvent posé la question et je dois admettre qu'à chaque fois j'ai été un peu pris de court. Comme j'ai probablement dû répondre de manière confuse ou incomplète, pour ne pas dire insatisfaisante, voici quelques éclaircissements.

Ce nom m'est venu spontanément comme ces phrases que l'on dit sans réfléchir ou comme ces idées lumineuses qui s'imposent à vous en éclipsant toutes les autres.

En effet, il y a dans Trois autres Thaïlande une fascinante histoire qui montre comment la mise au ban d’une pensionnaire d’un bordel par ses collègues va conduire celle-ci à la folie ; la protagoniste s’appelle Gop, un surnom qui veut dire grenouille en thaï (กบ), frog en anglais, une des affectueuses appellations dont nous affublent certains anglophones.

Or, il se trouve que j'avais en tête à ce moment là le proverbe indien suivant :
« L'homme qui ne sort pas et ne visite pas dans toute son étendue la terre pleine d'une foule de merveilles est une grenouille de puits. »
La vie m’a permis de m’échapper à plusieurs reprises de mon puits pour devenir une grenouille voyageuse, alors, en tant qu'éditeur, j'allais essayer de faire voyager par la magie des livres d’autres grenouilles qui pour une raison ou une autre restaient coincées dans leur puits – un défi dont on appréciera les risques en se reportant à la fable indienne ci-dessous.

À première vue, un nom court et facile à retenir comme G.O.P présentait des avantages évidents - je ne me voyais pas épeler x fois par jour au téléphone Le cercle herméneutique ou Desclée de Brouwer, par exemple. J'ai donc confié à un publicitaire aidé d'un graphiste la tâche d'en faire une marque et un logo. Et c'est ainsi que G.O.P est devenu GOPE, les sigles étant à éviter et l'oreille française ayant besoin d'un peu plus de rondeur m'a-t-on expliqué.

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La grenouille dans le puits

Il était une fois, une grenouille qui vivait au fond d’un puits. Ce puits était vaste et très confortable pour une petite grenouille. Elle regardait chaque jour le petit rond de ciel au dessus de sa tête. Elle tournait, sautait, plongeait, avait appris à connaître et exploré chaque pierre et chaque recoin de son puits. Cela lui avait pris toute sa vie de petite grenouille et elle en était très fière.

Un jour, une grenouille voyageuse qui avait très chaud et très soif sauta dans le puits.
Plouf !

« Bonjour madame Grenouille.
— Bonjour madame Grenouille.
— Enchantée de faire votre connaissance.
— Moi de même, chère madame Grenouille. Mais quel bon vent vous amène donc ici bas ?
— J’ai voyagé depuis l’aube, car je m’en reviens de l’océan pour aller voir ma grand-mère qui habite de l’autre côté de la forêt et comme il faisait très chaud, je me suis permise de sauter…
— Oh ! Vous avez très bien fait ma chère. Je vous en prie, faites comme chez vous. Vous prendrez bien une petite mouche… Mais où est donc ce puits océan dont vous me parlez ?
— Eh bien, l’océan n’est pas un puits ou si l’on peut le décrire comme tel, c’est un puits qui s’étend à l’infini, avec le ciel pour contour.
— Le ciel pour contour… Vous moquez-vous de moi ? C’est le monde à l’envers. Et comment l’eau peut-elle tenir alors ? Et comment peut-on tourner en rond sans murs ?
— Mais pourquoi voulez-vous donc tourner en rond puisqu’il n’y a pas de murs ? interrogea la grenouille voyageuse.
— Mais parce que c’est la vie de tourner en rond enfin ! s’exclama la grenouille du puits, un peu irritée du tour que prenait cette conversation qui avait pourtant si bien commencé.
— Ah ! dit l’autre, pensive. Mais vivre dans l’espace infini de l’océan, c’est merveilleux !
La grenouille du puits réfléchit. Elle imagina son puits sans ses pierres, pierres qu’elle connaissait depuis son enfance, le ciel du haut en bas… Non, vraiment, un puits sans pierre… des pierres en ciel… mais quelles carabistouilles est-elle en train de me raconter cette grenouille ?… Elle commença alors à avoir peur, s’imaginant que l’autre était en train de monter un stratagème pour lui donner envie de partir, pour lui voler son beau puits chéri.
— Eh bien, allez-vous en, sortez de chez moi et retournez-y dans votre fameux océan ! dit-elle en se montrant menaçante et ferme. »

La grenouille voyageuse, perplexe et déçue, partit tandis que la première retourna à ses occupations, trop heureuse d’avoir déjoué les plans d’une grenouille machiavélique.


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